echniques d'enluminures.

De nos jours, des produits commerciaux tels que le papier, la gouache ou l'aquarelle, l'encre d'Inde, peinture d'or, etc., sont employés, et certes, une belle peinture peut être produite... Mais ce n'est pas UNE ENLUMINURE au sens médiéval !
TECHNIQUES DE L'ENLUMINURE ET LE LIVRE D'HEURES.

Comme expliqué dans « Time Sanctified », les livres d'heures étaient les best-sellers du Moyen Âge et, à partir du 13ème jusqu'au 16ème siècle, ils ont été produits plus que n'importe quel autre livre, y compris la bible. Une des raisons de leur énorme popularité tenait dans les images que ces livres renfermaient, ils furent ainsi les prédécesseurs de l'illustration du livre moderne.

Le livre d'heures est un livre de prière, non destiné au clergé, mais aux gens ordinaires. Le laïc convoitait les prières récitées par le clergé et recherchait un livre qui puisse être à la fois facile à utiliser et agréable à l'œil. Les Patrons étaient ravis de ces livres d'heures dont les cycles reflétaient leur dévotion, leur goût et leur richesse. Ils espéraient que Dieu, leurs amis et leurs descendants puissent reconnaitre à la fois leur piété et leur bon goût, du coup ils inséraient une série de marques personnelles dans divers endroits du livre. Le plus souvent, il s'agissait de leur blason peint à l'intérieur d'initiales, le long des bords de pages, ou en tant qu'élément des miniatures. Mais le "must" était d'avoir un portrait d'eux-mêmes peint et présenté à la Vierge ou à un saint.

Comme dans la fabrication des livres modernes, il y avait une répartition des tâches qui conduisait à un processus sans heurt. Aujourd'hui, un enlumineur effectue habituellement tous les travaux suivant lorsqu'il crée une page :

Tout d'abord, le parchemin, qu'il soit de chèvre, de veaux, de mouton ou de cerf, était choisi en fonction de sa qualité (plus il était fin, meilleur c'était) puis préparé : Frotté légèrement avec du papier de verre pour enlever les graisses, puis poncé pour atteindre la texture correcte pour recevoir l'encre et la peinture. Si l'on frotte trop ou que l'on ponce de trop cela produit une surface en sorte de peau de daim qui fait baver l'encre ou la peinture.

A l'époque c'était le scribe qui commençait le travail en marquant les côtés de chaque feuille du parchemin avec une roue dentée (comme une roue dentée employée par les ouvrières couturières) pour fournir les marques préliminaires. Puis de délicates lignes, habituellement en rouge ou en brun, étaient tracées par dessus ces marques.

Dans ces lignes le scribe écrivait son texte, en laissant des espaces pour les majuscules, les miniatures et la conception des bords. Le texte calligraphié était alors protégé contre d'éventuels dommages en posant par dessus une bâche faite de vieux parchemins usés.

Puis le chargé des rubriques dessinait et peignait les lettrines décorées dans les espaces du texte laissé par le scribe. Les lettrines sont des majuscules fleuries au début d'une expression ou de toute autre partie importante du texte. Selon la taille du livre et la permission du Patron, les lettrines pouvaient aller de l'ornement avec de la couleur et de la feuille d'or à sa propre miniature pour compléter le message du texte.

Pour finir, dans la fabrication d'une page, le miniaturiste dessinait, dorait et colorait l'ensemble.

Les corrections étaient faites avec des miettes de pain. Aujourd'hui pour les retouches nous utilisons des crayons de graphite et une gomme pour des questions de vitesse et d'économie, car les effets de ces outils modernes n'apparaissent nullement dans l'enluminure finale.

De vieux parchemins usés étaient utilisés pour faire le schéma. L'arrière étaient noirci avec le graphite, ou frotté avec du bol d'Arménie, une argile rougeâtre (effaçable) qui ajoute de la couleur. Le schéma était ensuite transféré sur le parchemin avec la calligraphie et les lettrines.

Afin de rendre permanent le schéma ainsi transféré, on le retraçait à l'encre avec une plume d'oie. L'encre était faite à partir du résidu de carbone récupéré à l'intérieur de lampes alimentées au fuel, ou des écorces de chêne : Les guêpes pondent leurs œufs à la jonction des branches de chêne. Pour se protéger contre cet « envahisseur » les arbres forment des croûtes (écorces) autour des oeufs. Ces écorces sont écrasées et mélangées à de l'eau et à de l'oxyde de fer pour former une encre permanente.

L'encre diluée était employée pour tracer de fines lignes qui devaient être peinte dans des couleurs plus pâles, et l'encre non diluée servait à souligner les surfaces, les bords et les parties dorés de la peinture qui exigeait des couleurs plus foncées.

La dorure était accomplie de trois manières :

1 - Pour une dorure levée un gesso "sottile" se fait avec du plomb blanc, du plâtre de Paris, de la colle de poissons, et de l'argile rouge. La dorure levée pouvait être polie et travaillée.

2 - Dans la dorure plate, la feuille d'or était étendue sur une couche de colle de poissons, gomme d'ammoniac, de jus d'ail, de colle de peau d'animal, etc. La dorure plate peut être polie mais pas travaillée.

3 -La coquille d'or est la feuille d'or rectifiée dans une poudre et mélangée à la gomme arabique et une goutte de miel et puis polie.

Après la dorure vient la peinture. Les terres, les minéraux, les pierres semi-précieuses, comme par exemple la malachite ou l'azurite, sont écrasés dans un mortier pour en faire une poudre, puis dilués sur une plaque de marbre ou une assiette en verre. Si on voulait une peinture plus brillante, on ajoutait proportionnellement plus de gomme arabique et de miel. La gomme arabique est fragile quand elle est sèche et le miel donne de l'élasticité à la peinture. Certaines couleurs sont tout à fait opaques ; certaines sont glacées. La coquille d'or est la dernière couleur à être employée car elle peut couvrir et ajouter du rayonnement à n'importe quelle autre couleur.

Ces techniques et matériaux médiévaux décrits ci-dessus proviennent du « The Craftman’s Handbook » de Cennino Cennini écrit au XIVème siècle à Florence, et ce sont les mêmes techniques et matériaux que j'utilise aujourd'hui pour créer mes propres enluminures.